Historique > 1918-1961


L'affaire de Ham

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La carte du champ de bataille est disponible ici.

Récit de monsieur Roger Avignon, maréchal des logis au 93e GRDI en 1940 et ancien du 20e Dragons :

Le nom de Ham évoque la prison du prince Louis Napoléon Bonaparte au fort de Ham de 1840 à 1846, d'où il s'évade de façon rocambolesque le 26 avril 1846, déguisé en peintre.

Cette petite ville de la Somme s'illustrera à nouveau en 1940. Elle a été le théâtre de violents combats auxquels a participé le 18e GRDI, l'un de ces groupements de reconnaissance de division d'infanterie issus du 20e Dragons.

Le19 mai 1940, à 1 heure du matin, le détachement Vaudremont quitte Cuy avec 7 chars B 1bis du 15e BCC. Ces chars sont:

  • le Cambodge ( capitaine Vaudremont )
  • le Corse ( lieutenant Pagon )
  • l'Algérie ( sous-lieutenant Lauvin )
  • le Madagascar ( Lieutenant Dumontier )
  • l'Anjou ( sous-lieutenant Vieux )
  • le Nice ( Lieutenant Mathieu )
  • le Rennes ( Capitaine Laurent )

Le détachement arrive au petit jour à Guiscard où se joignent à lui 5 chars du 8e BCC, sous le commandement du lieutenant Dupont. Trois de ces chars sont hors d'état :

  • le Héros ( sous-lieutenant Serpeau )
  • le Tromblon ( lieutenant Hugo )
  • le Terrrible ( lieutenant Lamoine )

L'Indomptable ( sous lieutenant Bordeaux ) sert de char PC radio au colonel Roche, sa tourelle n'étant pas en d'état de tirer et le Corsaire ( lieutenant Rosenwald ), sans tourelleau, fait office de char PC. Le départ sur Ham est fixé vers 6 heures et la ville est atteinte 1 heure plus tard.

La 23e DI, alertée le 17 mai, est dans la Haute Marne, région de Chaumont, où elle doit aller s'installer sur la coupure Oise-canal Crozat de Tergnier à Mennessis et Saint Simon. La 3e divison légère d'infanterie doit aller en avant et à gauche de la 23e DI de Saint Simon (exclu) à Ham (largement inclus).

 

Fusil Mitrailleur 24-29 et chargeurs

Le 18e GRDI du commandant Pénicaud, Groupe de Reconnaissance de la 23e DI doit éclairer au profit de la 3e DLI, se porter sur Ham et tenir les passages du canal. Le 17, après un raid de plus de 220 km, l'escadron motocycliste du capitaine Pousset et les mitrailleurs portés du capitaine de la Quintinie (en tout 150 hommes) arrivent à Ham vers 20 heures et ne trouvent que le flot des réfugiés déferlant sans arrêt par les deux ponts sur le canal. Des postes sont installés en avant de Ham. Le 18 mai, à 9H30, sur la route de Saint-Quentin, près d'Aubigny, les patrouilles des lieutenants Villatte et de Corgnol, signalent l'approche de l'ennemi et se heurtent à quelques motocyclistes allemands qui bifurquent vers l'Est. Un Hotchkiss H 39 du 27e BCC ( sergent Gobereau ), débouche du pont mêlé aux voitures des réfugiés et se met à la disposition du commandant Pénicaud. Les interventions du char seront efficaces.

En fin de matinée, les premiers détachements de liaison du II/141e R.I de la 3e D.L.I arrivent sur les lieux. A 12H30, des side-cars allemands avancent sur Ham. Le premier est stoppé aux lisière Nord tenues par le peloton Boudot-Lamotte, on y relevera deux cadavres dont celui d'un officier de la 10e Pz.Div.

Une nouvelle tentative ennemie a lieu le soir même. Les Français se replient derrière le canal, les ponts sont barricadés. Le 19 mai, vers 4 heures, une forte attaque allemande est clouée sur place. Les cavaliers du 18e GRDI contre-attaquent, et se livrent à un combat de rues, maison par maison. Des ennemis qui avaient traversé le canal peuvent se replier : retranchés dans une maison, ils se défendent. Le peloton Sévenet les mets hors de combat : 12 morts et 15 prisonniers de la 10e Pz.Div " en chemise ", c'est à dire n'ayant sur eux que la chemise pour franchir le cours d'eau à la nage, ce qui a quelque peu amusé les cavaliers. Le lieutenant Sévenet a été grièvement blessé au cours de l'action.

Vers 7 heures, le capitaine Vaudremont prend contact avec le commandant Pénicaud et le commandant Buyer du II/141e R.I : une incursion au nord de Ham en direction de Saint-Quentin est fixée à 8 heures.

Les chars débouchent de la route de Guiscard, appuyés par un peloton moto du 18e GRDI et une section du II/141e R.I. Les chars de la section Dupont gardent le carrefour de Ham. A 8H45, les cavaliers défont leur barricade, les chars B passent et tombent 300 m plus loin sur une autre barricade, agrémentée de Tellermine, que l'ennemi a construit pendant la nuit. Elle est détruite par les B à coups de 75. dans la grand'rue, après un coude, l'Algérie, suivi du Corse, se heurte à des blindés et à des anti-chars, dont des 47. Très vite, une dizaine d'armes anti-chars sont détruites, les automitrailleuses ennemies de tête sont mises hors de combat par les tirs à bout portant. L'Algérie détruit un canon de 47 et fait exploser son caisson à munitions. Le Cambodge, qui suit, nettoie les fenêtres des maisons d'où partent des grenades.

Le maréchal des logis chef Lucien Ravel en 1937 lors d'un steeple-chase

La Somme est franchie, 4 canons de 37 Pak et 1 canon automoteur sont détruits par le Corse qui s'arrête : son blindage avant a été frappé par un 77 explosif, ses radiateurs sont crevés et une de ses poulies est en charpie. L'Anjou le relaie. Nouveau barrage allemand : le char est touché à plusieurs reprises après avoir démoli un canon. Les cavaliers du 18e GRDI réoccupent le poste avancé aux lisières Nord de Ham.

Son barbotin troué par un obus, le Madagascar ne peut avancer que très lentement, en première, pour regagner les lignes, de même que le Rennes qui a des ennuis de moteur. Sur la route de Guiscard, le Madagascar tombe en panne définitivement.

La résistance ennemie a été acharnée et il est déjà près de midi. Les moteurs des chars tournent depuis 5 heures : il faut les ravitailler en essence. L'objectif situé à 25 km ne peut être atteint, 5 chars sont hors d'état et l'infanterie n'est pas assez nombreuse. Par radio, le capitaine Vaudremont donne l'ordre de retour sur la base de départ.

Pour vaincre la résistance française, le soir vers 17 heures, pendant 25 minutes, l'aviation ennemie bombarde puissamment Ham et la région, y provoquant de nombreux incendies. Le maréchal des logis chef Lucien Ravel, du 18e GRDI, blessé au cours du bombardement, est évacué. Les chars Cambodge, Nice et Terrible sont dans Ham, aux ponts du canal pour protéger leur minage.

Le lendemain 20 mai, vers midi, l'aviation allemande bombarde à nouveau Ham. Vers 14 heures, le génie fait sauter les deux ponts du canal, le 141e R.I relève le 18e GRDI, relève protégée par le H 39 embossé près du canal. Vers 15 heures, le capitaine Vaudremont reçoit l'ordre de regagner Guiscard à la tombée de la nuit.

Les chars B quittent Ham vers 22 heures, les uns remorquant les autres ; seul le Madagascar, ne pouvant être remorqué, est abandonné. Puis ils prennent la direction de la forêt de Compiègne, lieu de regroupement de toutes les unités écartelées de la 2e DCR.

 

Les combats de Tannay

La résistance héroïque à Xertigny